Les jeunes, ça sait plus lire. J'veux dire les très jeunes, genre six-sept ans. Je me rappelle moi à 5 ans, j'avais pas la télé, c'était moyen-cool. Alors quand je rentrait de l'école, je tirais un Gaston de l'armoire pour essayer de le déchiffrer. Étant donné que je pigeais que pouic, j'inventais moi-même des histoires. De dingue. Des trucs de ouf malade.
Par exemple, un de mes gags préférés, c'était celui où Gaston et M'oiselle Jeanne prenait un raccourci par la foret pour atteindre le départ d'une course de voitures, et lorsque la voiture en ressortait, une des voitures de course passait en trombe et les propulsaient dans un arbre. S'ensuivait une chute du style "Ben voilà, on a trouvé l'endroit idéal pour regarder la course." Génial, pas vrai ?
Moi, je me rappelle que j'avais imaginé une histoire super marrante, que Jeanne et Gaston, ils allaient faire des bébés dans les bois, qu'ils cherchaient un coin tranquille et que finalement, comme y avait la course, autant la regarder, parce que de toute façon, y avait trop de bruit pour faire du sexe.
Pouet pouet, que d'alacrité.
Et un jour j'ai apris à lire, comme ça, paf. Et quelle ne fut pas ma surprise quand je découvrit amèrement que Franquin, ce beau salaud, avait ruiné ma blague incroyable par sa ville saloperie. Quel paltoquet, me soustraire ainsi aux plus grands noms de l'humour tels que Joseph Staline et Bernadette Soubirou. C'était fini. J'étais fini. Je ne lisais plus que des Tintin et des Astérix, remplis d'aventures et de gaulois (en tout cas pour un). Gaston n'existait plus pour moi. Et puis finalement, un beau jour, en rouvrant l'album, j'ai bien dû me soumettre à la réalité. Je n'avais détesté Franquin que parce qu'il m'avait percé à jour. Ma blague refoulait le poisson.
Bref, tout ça pour dire que quand j'ai voulu offrir un Gaston à un gosse pour Noël, il m'a dit qu'il aimait pas les BD et a essayé de piquer le playmobil d'un autre gosse.
Enculé.